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A. Présentation du projet :

L'Hypernaute

Le cahier électronique des Cybermômes
de l'agglomération Roubaix / Tourcoing.

Les nouvelles technologies seront éducatives si elles permettent des situations d'apprentissage mieux adaptées aux besoins de formation des élèves.

 

 

L'utilisation des technologies de la communication dans les écoles roubaisiennes n'est pas une nouveauté. Le travail autour des médias y est une constante depuis plus de dix ans (la première réalisation audio-visuelle date de 1987). Depuis 1991, le SIVU "Vecteur Roubaix-Tourcoing" a permis non seulement le développement de l'utilisation de l'image en classe (65% des commandes Educâble de France se font sur le secteur, ce qui assure lui place de leader au niveau national) mais aussi la production de nombreux vidéogrammes. En parallèle à cette forte activité audio-visuelle, il s'est progressivement mis en place tout un travail avec les outils informatiques (premier diaporama numérique sonore en 1994 ; premier hyperdocument, en 1995). Cette année encore, le festival vidéo des écoliers "Clap Cartable" à réuni, dans notre agglomération, plusieurs dizaines vidéogrammes venus de toute le France...

Historiquement, l'Hypernaute est le fruit d'une collaboration inter-circonscriptions avec la ville de Roubaix et la division enseignement et recherche d'Apple Computer France, depuis novembre 1995. Il s'agit d'un document électronique interactif présentant des productions numériques, à caractère documentaires, réalisées par des élèves. Ce document intègre textes, images fixes ou animées, commentaires, sons et musiques. Il ne peut être consulté que sur un micro-ordinateur doté de fonctions multimédias. Ce projet s'inspire à la fois des journaux télévisés régionaux, de la Bibliothèque de Travail et de la presse à l'école.

18 novembre 1997, date du lancement officiel d'Edunet dans le Nord, l'Hypernaute s'inscrit dans la dynamique du plan académique pour Internet : depuis cette date, des réalisations de classe sont consultables sur Net' IA 59, le site Web de l'Inspection Académique du Nord .

7 mai 98, l'Hypernaute devient le projet pédagogique TICE fédérateur pour l'ensemble du secteur de formation continue 1er degré du secteur Roubaix-Tourcoing. Suite à la signature d'une convention de partenariat, en vue de la formation des enseignants, entre l'Inspection Académique du Nord, le SIVU de l'agglomération Roubaix-Tourcoing pour le développement de la communication et le Centre International de la Communication (sur le site Eurotéléport Belgacom, à Roubaix).

En complète conformité avec le projet académique d'intégration des NTIC publié par le Rectorat du Nord en juin 98, l'Hypernaute va être le catalyseur de deux actions remarquable :
- La mise en place par M. le Recteur du Nord de l'expérimentation nationale " le pupitre du XXIe siècle ", dont l'une des classes est installée sur le site du 125 rue Brossolette à Roubaix ('classe de Bruno Hajzler). Il s'agit de réaliser un prototype de la classe de demain Le protocole expérimental prévoit une classe dans laquelle chaque élève dispose d'un " pupitre électronique ". Tous les " pupitres " constituent un réseau local, lui-même relié au réseau distant. Dans cette classe, l'outil informatique est disponible en permanence et utilisé dans les apprentissages au moins 30 % du temps. Le maître y reste le maître, c'est lui qui en fonction de ses objectifs didactiques détermine comment il utilise la technologie dans sa classe. Cette classe sera installée dans un local qui sera libéré dans l'école Brossolette.
- La volonté de l'opérateur NC Numéri-câble de faire du " SIVU Vecteur Roubaix-Tourcoing " (secteur des 12 communes du futur Bassin de Formation et d'Emploi) l'un de ces sites pilote national, en permettant le raccordement de plus de 200 établissements scolaires du 1er degré à Internet par le réseau câblé. Ce qui a terme constituera un remarquable intranet éducatif au haut débit. Le coeur de cet intranet devrait être le site du 125 rue Brossolette à Roubaix.

23 mars 1999, l'Hypernaute est retenu par le Ministère de l'Education Nationale de la Recherche et de la Technologie, dans le cadre de l'appel à projets " N.T.I.C.-Territoire et nouvelles pratiques pédagogiques " lancé conjointement avec la DATAR. Cette labellisation permettra d'obtenir les financements nécessaires à l'augmentation du nombre d'unités mobiles de production multimédia : la participation à l'Hypernaute se fera toujours indépendamment de l'équipement informatique de l'école, si certaines d'entre-elles sont déjà équipées de matériel permettant une réception correcte d'Internet, peu ont un matériel adapté pour finaliser une production intégrant des images fixes ou animées et du son. C'est la raison pour laquelle, nous avions répondu à cet appel à projet, afin de pouvoir renforcer le nombre d'unités mobiles de production hypermédia, destinées à l'organisation de stages dans les écoles ou être prêtées à des enseignants, pour une durée négociée en fonction du type de projet. Mais il n'appartient pas institutionnellement à l'Education Nationale de privilégier un standard plutôt qu'un autre. Aussi nous semble-t-il fondamental de pouvoir proposer en prêt, de matériels permettant la finalisation de productions multistandards (pour Mac OS et Windows). Car la pensée unique n'a pas lieu d'être en matière de Technologies Educatives de Communication : s'il est du devoir des technologues de l'éducation d'explorer et de présenter toutes les solutions possibles ; il appartient à chaque enseignant de choisir, en connaissance de cause, les outils qui peuvent aider à réformer l'éducation, l'enseignement et les méthodes d'apprentissages.

Progressivement, l'Hypernaute sera étendu, à certains établissements du 2nd degré classés ZEP des circonscriptions de Roubaix Centre et de Roubaix Est, dans l'esprit du projet "lecture / écriture", mis en place dans le cadre de la liaison CM2-6e, depuis septembre 1997, sur la ZEP Samain. Des contacts récents entre écoles élémentaires et collèges laissent penser que d'autres collèges de l'agglomération Roubaix / Tourcoing devraient rapidement se joindre au projet.

 

 

Définition du cadre de formation.

 

Dès janvier 1996, un premier stage permet à la dizaine d'enseignants volontaires pour l'Hypernaute de prendre conscience de l'aspect novateur de ce type de projet. Par la suite, ces enseignants ont pu profiter de journées de formation, en petits groupes, en fonction de leurs besoins. La maîtrise d'un outil simple de mise en page est fondamentale pour la réalisation des différents écrans. ClarisWorks convient parfaitement à cette tâche, tant pour les élèves travaillant sous Mac OS que sous Windows. La mutualisation des ressources des différentes écoles et le matériel prêté par la division enseignement et recherche d'Apple Computer France ont permis la numérisation des médias (sons, images fixes ou animées) et le travail de retouche d'images.

En 1997, d'autres stages ont permis des formations à l'édition de médias électroniques et aux logiciels auteurs. L'usage du logiciel auteur HyperStudio, a permis aux stagiaires de réaliser des documents mettant en relief un certain nombre de pistes intéressantes, faisant appel à des développements Apple Media Tool et des fichiers ClarisWorks. Progressivement, les formations se sont orientées vers des productions au format html. Les productions hypermédias sont ainsi encore plus faciles à réaliser, et elles peuvent être consultées sur n'importe quel ordinateur (qu'il soit relié ou non à Internet) à l'aide de Netscape Navigator ou MS Internet Explorer.

En 1998/99, l'Inspection Académique du Nord, mets à disposition du secteur de formation Roubaix-Tourcoing 5 moyens de remplacement à l'année, pour la formation des enseignants du secteur, dans le cadre du projet Hypernaute.

Pour l'année scolaire 1999/2000, 11 semaines de stage seront organisés dans le cadre de la formation continue des enseignants de l'agglomération Roubaix-Tourcoing.

Si la formation des enseignants aux différents médias est essentielle, tant au plan culturel que pédagogique, elle implique de la part des formateurs une maîtrise globale des problèmes inhérents à chacun des médias, afin de cerner les difficultés sur les plans technique et éthique, ainsi que leur rapport avec la didactique des disciplines. Les rapports entre l'information, la connaissance et le savoir d'une part et l'importance de la médiation dans les apprentissages d'autre part ont notamment été l'objet d'études particulières, à chaque stage. Parfois, pour des raisons liées aux technologies, une certaine spécialisation peut sembler souhaitable, cependant le formateur ne doit pas s'enfermer dans la technique, car elle seule ne donne pas de sens à l'apprentissage : il y a là aussi un besoin de formation, pour le formateur comme pour l'enseignant, afin d'être en phase avec l'actualité des recherches en éducation.

Pour les années scolaires à venir, certaines orientations ont déjà été définies par les Inspecteurs de l'Education Nationale du bassin d'éducation Roubaix-Tourcoing :

  • Le souhait de mettre l'accent sur la formation de la totalité des équipes de circonscription : Inspecteurs de l'Education Nationale, les secrétaires d'inspection, tous les personnels appelés à former leurs collègues et à stimuler le développement des TEC dans les écoles.
  • La volonté de veiller à un réel équilibre entre pédagogie et technologie, en axant la réflexion et les formations sur l'amélioration des pratiques pédagogiques, selon deux directions principales : la production d'écrits et la recherche documentaire.
    L'état d'esprit sera plus proche de celui du "moniteur d'auto école" que du "mécanicien", partant du principe que notre intention n'est pas de "faire de l'informatique", mais d'utiliser l'outil informatique quand il nous permet d'atteindre les objectifs didactiques que nous nous fixons.
  • L'urgence d'identifier et de labéliser les ressources, en rapport avec l'éducation, accessibles par Internet, afin d'en faciliter l'usage par les enseignants.
  • L'idée de privilégier au maximum le courrier électronique pour les échanges professionnels : informations administratives, pédagogiques, manifestations, échanges entre établissements scolaires, entre enseignants.
    La liste de diffusion électronique "Hypernaute" est déjà opérationnelle, elle propose des activités de classes et apporte des informations et des réflexions sur les technologies éducatives de communication.

 

 

L'ordinateur : un outil de production

 
Résumer le multimédia à la simple consultation,
c'est apprendre à lire sans apprendre à écrire,
c'est pourquoi notre objectif est d'en faire
un support d'apprentissage par lequel
l'enfant peut exprimer ses savoirs.

 

L'usage social majeur de l'ordinateur n'est pas la consommation de didacticiels. L'EAO (Enseignement Assisté par Ordinateur) n'est que l'une des applications informatiques pédagogiques possibles. Associer le sort du micro-ordinateur dans l'enseignement à l'existence de didacticiels résulte d'une vision réductrice. Les exercices de systématisation ont -bien entendu- leur place dans l'enseignement. En général, ils peuvent boucler une situation d'apprentissage, mais ils ne sont pas l'unique activité proposée par les enseignants à leurs élèves. De plus, la plupart des logiciels ayant des prétentions éducatives ne répondent que rarement à des cahiers des charges établis par des pédagogues et dans ce domaine le pire côtoie rarement le meilleur. Ce n'est pas la technologie qui rend intelligent. Pour la maîtrise de la langue, la structuration des idées et l'organisation de la pensée, le seul logiciel réellement éducatif et indispensable à l'école serait sans doute un logiciel du type traitement de texte.

Ce n'est pas la technologie qui rend intelligent. C'est le sujet qui apprend. <<Les choses qu'il faut apprendre pour les faire, c'est en les faisant que nous les apprenons>> dit Aristote (Éthique à Nicomaque), ce qui est complété par Olivier Reboul : <<Et c'est là qu'éclate le paradoxe; il faut faire ce que l'on ne sait pas faire pour apprendre à le faire ! C'est en forgeant qu'on devient forgeron, mais comment forger si on n'est pas forgeron ? Ce paradoxe est l'essence même de l'apprentissage.>> Si on admet l'idée qu'un enfant n'apprend pas en écoutant mais en faisant et qu' "enseigner, c'est proposer des situations d'apprentissage" plus que "transmettre des connaissances", le rôle de l'ordinateur à l'école est autant dans la création que dans la consultation. L'ordinateur est alors un outil de production au service de l'imagination et de la créativité des élèves comme des enseignants. La richesse de ses fonctions multimédias ouvre des voies nouvelles de réflexion, d'expression et de traitement de l'information.

La production si modeste soit-elle est le seul moyen de vérifier le transfert des connaissances en savoirs. Jean-Pierre Astolfi précise <<Le savoir, lui, résulte d'un processus d'objectivation de la connaissance : il est construit par le sujet au travers d'une formalisation théorique, moyennant l'élaboration d'un langage approprié.>>

Cependant, ne nous leurrons pas, si la production peut être un objectif pour l'élève, elle n'est qu'un moyen pour le maître. Les objectifs de l'enseignant sont souvent ailleurs et n'ont pas toujours un caractère aussi démonstratif. Celui-ci pourrait d'ailleurs choisir parmi toute une palette de supports pour organiser cette reformulation par ses élèves : exposé oral, exposition sous forme de panneaux, article pour le journal d'école ou le quotidien local ; réalisation d'un vidéogramme, d'une borne interactive, d'un site web etc... L'important, c'est que l'activité ait un sens pour l'élève et qu'elle se déroule dans une réelle situation de communication.

Etre ou ne pas être sur Internet, ne différencie pas la publication. Ce n'est pas là que se situe la spécificité des Technologies Educatives de Communication, même si elles constituent <<au moins un encouragement puissant à écrire aussi bien que l'on est capable>>. L'avantage du numérique (sur l'atomique) est qu'il est généralement plus facile à manipuler, <<avec la sécurité d'obtenir à tout moment un résultat propre et valorisant>>, comme le précisait déjà la (révolutionnaire : - ) circulaire n° 87-160 du 11 juin 1987, toujours d'actualité, publiée p 1351 dans le Bulletin Officiel de l'Education Nationale, n° 24 - 18 juin 1987.

 

 

 

Les objectifs :

  • Lire un nouveau support d'écrits, les documents électroniques interactifs : moyens de communication différée.
  • Découvrir l'architecture de documents électroniques interactifs et les invariants inhérents à ce type de production.
  • Ecrire en respectant les contraintes des documents électroniques interactifs.


Dans l'Hypernaute, l'aspect technologique n'est jamais prioritaire : le minimum exigé dans ce domaine est la saisie des textes et le choix des médias.

Notre volonté est que l'élève soit metteur en scène, jamais technicien. Dans la plupart des classes, la mise en écran a été réalisée par les élèves dans le module de dessin vectoriel de ClarisWorks. Cette année, elle pourra se faire directement en html à l'aide du logiciel AdobePageMill (Cet éditeur html présente de forte similitude avec un traitement de texte).

Le montage final (sous Apple Media Tool) et la numérisation de tous les médias (photos, vidéos et sons) ont été réalisés au cours de stages de formation continue, par les collègues, sur du matériel prêté par le département enseignement et recherche d'Apple Computer France (merci Sophie, Fred et Michel...)

Mais c'est chaque enseignant qui à choisi d'introduire plus ou moins l'usage de la technologie dans sa classe, selon ses aptitudes personnelles et du matériel dont il pouvait disposer. Il est certainement intéressant, quand on en a la possibilité, de montrer aux élèves comment numériser une image fixe avec un scanner. Il n'est pas sûr qu'il soit indispensable que tous les élèves sachent le faire à l'âge de 10 ans. En tout cas, le projet n'en serait pas plus pédagogique pour autant.

La pensée unique n'a pas lieu d'être en matière de Technologies Educatives de Communication. Il est du devoir des technologues de l'éducation d'explorer et de présenter toutes les solutions possibles ; afin que chaque enseignant puisse choisir, en connaissance de cause, des outils qui peuvent aider à réformer l'éducation, l'enseignement et les méthodes d'apprentissages. Robert BIBEAU précise : <<Que l'on discoure de l'intégration de l'ordinateur en classe ou de l'implantation de l'autoroute électronique à l'école, dans les deux cas le véritable problème n'est pas d'intégrer ces technologies à l'école ou à la classe, mais de réformer et de moderniser la pédagogie à l'aide de ces technologies, afin que le système éducatif réponde mieux aux besoins de formation.>>

 

Pensons pédagogie, et non technologie...

 

 

 

 

 

 

Les effets souhaités :

 

  • Donner un sens aux apprentissages scolaires et plus particulièrement à toutes les activités de français de la classe.
  • Motiver ces apprentissages en développant de nouvelles techniques, de nouvelles pratiques de lecture et d'écriture.
  • Permettre à l'élève :
      - d'accéder à des informations par des supports de médias variés
      - d'acquérir des connaissances
      - d'objectiver ses connaissances en savoirs, par une production
      - d'être producteur d'informations
      - de gérer sa production
      - d'entrer dans la "société cognitive"
  • S'interroger sur les modifications profondes créées par les Nouvelles Technologies de l'Information et de la Communication dans notre société, et tenter de définir le rôle que doit jouer l'Ecole pour être à la hauteur de sa tâche.
  • Fédérer une dynamique pour l'utilisation pédagogique des Technologies Educatives de Communication dans l'enseignement au quotidien.
  • Faire connaître ce que fait l'Ecole.

 

 

 

 

 

 

 

B. Les hyperdocuments

 

Distinguer multimédia et hypermédia :

 

Le multimédia : Ce concept fait référence à l'interaction "homme/machine". Il pourrait être défini comme le phénomène socio-techno-culturel résultant de la fusion de l'ordinateur, de la télévision, de la chaîne Hi-fi et du téléphone dans une configuration matérielle unique.

 

Il peut être utile de compléter cette analyse des évolutions techniques par une réflexion sur les mutations sociales qui pourraient être à l'origine de ce nouveau média. Dans cette perspective, on peut se poser la question suivante : le multimédia répond-t-il à de nouveaux besoins ou à de nouvelles conceptions sociales ?

 

On peut tout d'abord analyser l'émergence de ces nouveaux médias comme un nouvel avatar des techniques de marketing des industriels qui chercheraient à créer de nouveaux besoins de consommation.

On peut aussi penser que nos sociétés auraient besoin de nouveaux modes de transmission des connaissances. Si on considère les grands médias audio-visuels populaires, et leur ordre d'apparition historique, on constate une évolution dans les modes de consommation de l'information :

 - Cinéma  -> collectif
 - Télévison  -> familial
 - Micro-ordinateur  -> individuel

Ces évolutions techniques récentes sont à l'origine de mutations sociales importantes. Nous sommes à l'aube d'une nouvelle révolution industrielle. Les Technologies de l'Information et de la Communication seraient le marché qui aura la plus forte croissance dans les années à venir. L'information serait le "pétrole" du prochain millénaire : en recevoir, en produire, mais surtout en diffuser seront de nouvelles sources de pouvoir. De véritables empires s'édifient actuellement : les annonces de fusions ou de disparitions d'entreprises reforcent le sentiment que ce marché sera particulièrement vital. Il semble (aujourd'hui) qu'il soit difficile de trouver une alternative entre une conception libérale qui présente l'avènement de la "société de l'information" comme un nouveau modèle économique ; et une conception libertaire qui propose l'intelligence collective et le travail collaboratif pour construire la "société cognitive".

 

hypermédia ou hyperdocument : Ce concept fait référence à l'interaction "homme/connaissance".

Il découle directement d'un concept théorique imaginé par Vannevar BUSH en 1945. V. BUSH était un scientifique qui rêvait d'une bibliothèque personnelle gérée par ordinateur, dans laquelle il aurait pu stocker toute sorte de documents, aussi bien des livres que des enregistrements. Son système (Memex) avait pour objectif de permettre à un spécialiste d'une discipline de suivre l'évolution de la recherche sans être submergé par l'information, ni dépassé par les difficultés à y accéder. Les obstacles technologiques n'ont pas permis la réalisation du projet de V. BUSH. Douglas ENGELBART, connu pour avoir développé l'environnement informatique qui nous est désormais familier (menus, fenêtres multiples, souris, etc) développe dès 1963 le système NLS. Il s'agit d'une base de fragments de texte de structure hiérarchique, contenant l'ensemble des documents, notes, rapports, etc d'une organisation (groupe de recherche, équipe de projet). Des systèmes de filtres permettent à chaque utilisateur d'avoir une vue individualisée de la base de données partagées. L'objectif de D. ENGELBART est d'utiliser l'ordinateur pour augmenter les capacités de l'intellect et de l'intelligence des organisations. Il insiste sur la nécessité de développer des environnements de travail collaboratif (le groupware) intégrant des fonctionnalités de courrier électronique, de rédaction collective, ou encore de téléconférence. Dans les années 70, c'est Teodor NELSON qui invente les termes d'hypertexte et d'hypermédia, pour décrire son système (Xanadu), qui partait du principe que tout document devait être relié à l'ensemble des documents auxquels il faisait référence, mais aussi à ceux qui lui font référence. Ce système était prévu pour fonctionner en réseau (plates-formes SUN). Le préfixe "hyper" est issu du vocabulaire scientifique, et désigne quelque chose d'étendu, de généralisé. Plus tard, en 1987, avec le logiciel Hypercard (Distribué gratuitement par Apple), ou le logiciel Guide sur PC, les environnements permettant de gérer des hyperdocuments ont fait leur apparition sur les micro-ordinateurs.

L'espace de communication créé par la généralisation du concept de l'hypertexte et la mise en réseau des ordinateurs à l'échelon planétaire constitue le cyberespace. Selon Pierre LEVY, le projet de la cyberculture est l'intelligence collective.

 

 

 

Définition fonctionnelle d'un hyperdocument

 

L'hypertexte désigne un mode de gestion de l'information dans lequel cette dernière est représentée sous la forme de blocs de textes ou unités d'information, appelés noeuds. On parle d'hypermédia lorsque les noeuds contiennent non seulement du texte mais aussi des images, fixes ou animées, des graphiques, ou des séquences sonores. Les unités d'information sont connectées entre elles par des liens. Le principe de consultation d'un hyperdocument est toujours le même : à l'intérieur du document, une action à l'aide de la souris sur une zone sensible de l'écran appelée ancre (une chaîne de caractères, une image ou une partie d'image, un "bouton", etc) provoque l'affichage d'une nouvelle unité d'information.

 

Un hyperdocument réunit sur un même support trois "couches" d'information : une base documentaire, une organisation de l'accès à ces documents (que l'on peut appeler navigation ou scénario) et enfin une interface graphique. Cette définition, qui n'est pas forcément celle qu'on retrouve dans les médias ou dans la littérature, a l'avantage d'être fonctionnelle. Elle permet de se poser les questions principales lors du choix d'un cédérom du commerce :

· Les documents (les médias) : quels sont les documents disponibles, sont-ils pertinents à mes objectifs ? La réflexion sur les documents devrait être menée discipline par discipline, dans une approche didactique, il serait bon que la base documentaire soit composée de documents authentiques, et d'éviter les reconstitutions.

En fonction du type d'information, le média (texte, son, image fixe ou animée) est-il pertinent ? N'y a-t-il pas, ici ou là, accumulation de médias, sans volonté réelle de tirer la quintescence de chacun de ces médias ? (Souvent, l'effet de mode entraîne un usage non pertinent de la vidéo.)

· La navigation (le scénario) : comment les documents sont-ils organisés ? Quel chemin faut-il emprunter pour y avoir accès ? Ce chemin est judicieux ? Cette navigation permet-elle d'accéder à l'information selon différents médias ? La logique d'accès aux documents devrait être paramétrable par l'utilisateur, ou du moins ne pas remettre en cause les possibilités d'individualiser les accès à l'information (cette condition est rarement remplie par les cédéroms du commerce : cheminement figé, absence d'outils de traitement).

· L'interface (ce que l'utilisateur voit à l'écran) : L'interface est lisible ? Peut-elle correspondre aux attentes ou aux conceptions de l'utilisateur ? Va-t-elle l'aider à se faire une représentation du réseau de connaissances de la base et des divers liens ? Cette interface graphique est-elle signifiante ? (par signifiante, on pourrait au moins s'accorder sur la nécessité d'une interface esthétiquement cohérente, et qui s'appuie sur les attentes des utilisateurs, qui sont aussi des téléspectateurs ou des utilisateurs de jeux vidéo...).

 

Cette définition présente l'avantage de bien rendre compte des différentes étapes à suivre lors de la réalisation d'un hyperdocument : il faudra collecter des documents, puis les organiser et enfin les mettre à disposition d'un public à travers une interface.

 

 

 

 

Méthodologie de conception et de réalisation d'un hyperdocument

 

On considérera ici que le choix du message ainsi que les enjeux de communication sont déjà clairement déterminés.

 

1) Justifier la création d'un hypermédia

 

a) Avantages :

  • diversifier les sources d'information (audio/vidéo/texte)
  • facilitation technique (par rapport à la constitution d'un fond documentaire traditionnel)
  • concentration sur un même support
  • avoir le choix entre unifier ou diversifier les accès aux sources documentaires

 

b) Défauts :

  • perte de matérialité (absence de contact physique avec le document)
  • problème du rapport réel/virtuel
  • manque au niveau des systèmes d'exploitation de l'information

 

2) Définir un public :

  • enfants/jeunes/adultes
  • grand public/public ciblé (à définir avec précision)

 

3) Définir un genre :

  • jeu
  • culture
  • dictionnaire - encyclopédie
  • éducation
  • communication interne

 

4) Conception et scénarisation du projet

 

a) Traitement de l'information

  • Recherche documentaire sur un sujet : investigation
  • Enquête
  • Collecte, classement des documents : textes, photos, sons, films
  • Constitution de documents : questionnaires, interviews
-> problème de la gestion d'une masse documentaire importante
-> problème du choix de médias pertinents
nécessité de faire appel à un expert du domaine, de travailler avec un documentaliste.

 

  • Tri des documents en fonction de la ligne rédactionnelle et de la pertinence du media.
  • Organisation des différentes informations, maquettes et rédaction d'articles.

 

b) Organisation de l'information

  • Consultation de documents électroniques interactifs, pour isoler les invariants inhérents à ce type de produit.
  • Elaboration d'un scénario et aller-retour avec la réalisation d'une charte graphique.
  • Elaboration du plan du document hypermédia : écrans et liens
  • Préparation des objets de chaque écran et de la grille écran
-> nécessité de faire appel à un graphiste
-> importance de "penser en écrans"

 

  • Choix du logiciel auteur
  • Elaboration du dossier médias électroniques, avec tous les éléments numériques au bon format
-> nécessité de faire appel à un développeur (suivant le type de logiciel auteur).
-> définir le cahier des charges "technologique" de la production

 

c) Montage du projet

  • Montage
  • Débogage.
  • Bon à tirer
  • Stockage.

 

d) Diffusion.

 

5) Rappel des contraintes liées à tout type de production

Il faut être perfectionniste :

  • Attention aux droits ! Pour tout document (enregistrement, dessin, photo, film) être en mesure de prouver qu'il est libre de droit ou que son auteur autorise sa diffusion dans le document électronique interactif sans aucune rétribution (ou en payer les droits).
    S'assurer que toute personne citée dans la production a signé une autorisation permettant de rapporter ses propos dans le document électronique interactif sans aucune rétribution (ou en payer les droits).
     
  • Crédits : prévoir une liste faisant apparaître la source ou l'auteur de tout document utilisé dans la production; les personnes à remercier pour leur aide active et les partenaires financiers éventuels.

 

 

 

 

C. Hyperdocuments et apprentissage

 

D'une manière générale, on peut constater qu'historiquement ces concepts n'ont jamais rien eu à voir avec le domaine de l'enseignement, mais beaucoup plus avec le domaine de la recherche scientifique. Il faut donc maintenant se poser la question des apports des hyperdocuments au domaine éducatif.

 

Si on considère qu'un hyperdocument c'est du texte, de l'image et du son sur un même support, alors on se retrouve face à toutes les problématiques liées à l'intégration de l'audiovisuel dans les classes. Les Instructions Officielles reconnaissent comme nécessaire l'intégration de l'audiovisuel. En réalité, dans les classes, cette intégration est loin d'être réalisée...

 

Si on considère qu'un hyperdocument c'est avant tout un programme informatique, on se retrouve alors face aux problématiques liées à l'utilisation de l'ordinateur en classe : on pourra considérer que ce qui est important c'est la possibilité d'interagir en direct avec une machine ou un programme. Dans ce cas, l'hyperdocument pourrait être la suite logique de la mode des didacticiels, ces programmes informatiques qui utilisent depuis longtemps des images, des textes et de l'interactivité. Dès les années 50, il y a eu tout un engouement autour de l'intelligence artificielle, qui a conduit à essayer de faire des "machines à apprendre".

 

· Dans le pire des cas, cette mode des didacticiels a débouché sur des batteries automatisées d'exercices directement calqués sur les manuels scolaires qui ne comportent généralement aucune trace d'intelligence artificielle.

 

· Dans le meilleur des cas, les programmeurs ont tenté de s'appuyer sur des modèles psychologiques définis par les théories de l'apprentissage, pour réaliser des "tuteurs intelligents" qui n'ont en réalité jamais marché pour plusieurs raisons :

  • Ces logiciels étaient effroyablement complexes à mettre en uvre, donc très coûteux à réaliser.
  • Pour fonctionner, ces programmes devaient disposer d'un modèle de l'élève, or il n'existe pas d'accord consensuel des scientifiques sur une théorie de l'apprentissage, qui serait valable pour tous les apprenants.

 

-> les échecs de ce champ de recherche ont en fait eu un aspect très positif qui a consisté justement à revoir avec plus de modestie toutes nos conceptions sur l'apprentissage.

 

 

 

 

Individualiser la formation

 

L'abandon de ces "tuteurs intelligents" aboutit maintenant à de nombreuses recherches concernant l'intégration des hyperdocuments dans un contexte d'apprentissage. Ces recherches renvoient aux difficultés pour un élève de gérer son propre apprentissage en autonomie, ce qui implique une réflexion sur le niveau ou le type de guidage susceptible d'orienter l'élève dans cet apprentissage. Cette question n'est pas résolue, et renvoie à toutes les recherches sur l'importance de la médiation dans l'apprentissage.

 

Cependant, l'utilisation d'hyperdocuments à l'école semble pouvoir accompagner le souci actuel d'une individualisation de l'enseignement :

  • d'une part en imposant une relation individuelle à l'objet technique (difficile d'être à plus de deux personnes devant un ordinateur, ce qui n'était pas encore le cas avec la télévision).
  • d'autre part en permettant (du moins en théorie) un accès différencié à l'information (par le son, l'image ou le texte)

 

A ce sujet, les thèmes de recherche de la psychologie cognitive sont aussi un signe d'une plus grande attention portée à l'individu : c'est par exemple, les recherches sur les multiples intelligences de GARDNER, ou bien les recherches sur les différences individuelles en matière de représentations mentales. On sait maintenant qu'en fonction du sexe, de l'âge, ou bien en fonction du problème à résoudre, les individus feront appel soit à des représentations mentales imagées, soit à des représentations mentales verbales. On a pu aussi montrer que la Mémoire Court Terme (celle qui stocke les informations en cours de traitement par le cerveau) traite à la fois l'information verbale et l'information visuelle, de manière indépendante et coordonnée, et ce sans surcharge cognitive. On s'est aussi rendu compte, avec Antonin DAMASIO, de l'importance des émotions dans le raisonnement humain : on a donc abandonné le vieux schéma uniforme de la pensée logico-mathématique. Pour rester dans ce registre, DAMASIO (et d'autres avant lui) ont pu montrer que le cerveau ne traite pas l'information d'une manière centralisée, mais au contraire en associant un nombre incalculable de centres de traitement, qui se mettent en place de manière souple et en fonction du vécu et des gènes de chaque individu (là aussi on abandonne les vieux schémas des zones cérébrales figées et identiques pour tout le monde, au profit d'une spécialisation individuelle).

 

L'usage d'hyperdocuments peut permettre d'accompagner un renouvellement des pratiques pédagogiques, issues des nouvelles conceptions de la psychologie cognitive, en respectant peut-être mieux qu'auparavant les différences entre les apprenants. Du point de vue plus général des modes de pensée ou d'expression de la société, il semble y avoir une évolution vers un mode de pensée associatif, plus proche semble-t-il, du fonctionnement du cerveau.

 

 

 

 


Construire du savoir sur le savoir

 

Certains chercheurs étudient plutôt l'hypertexte en tant qu'outil de réflexion sur nos propres pratiques de lecteur ou d'apprenant. Katell BRIATTE étudie les liens qui associent la création d'hyperdocuments et les modes de construction et d'appropriation des savoirs : <<Les créations d'hyperdocuments peuvent à leur tour être investies dans une pratique pédagogique axée sur la construction sociale de connaissances, impliquant une nouvelle relation formateur/formé/document : Le formé se trouve désormais dans une situation telle qu'il a à sa disposition, potentiellement, les mêmes sources d'information que le formateur. Mais ce qui les sépare encore, c'est la capacité qu'ils ont à exploiter et à comprendre ces informations, autrement dit à expliciter les relations existant entre elles. En présence d'un fait ou d'un texte, le formateur met en oeuvre, consciemment ou non, un certain nombre de stratégies, utilise un certain nombre d'indices. C'est tout cet ensemble de métaconnaissances que le formé, en général, ne possède pas.>>

Dans le projet pédagogique de l'Hypernaute, l'une des étapes fondamentales pour la construction des connaissances est l'élaboration du graphe du document électronique interactif. Généralement, il est construit en fond de classe directement sur le mur ou sur une grande affiche. Les élèves y installent des feuilles représentant tous les écrans du document à réaliser. Puis, sont matérialisés les liens entre les écrans au feutre ou à l'aide de ficelle et de patafix. A l'aide d'un surligneur, sont mises en évidence les zones sensibles de l'écran (une chaîne de caractères, une image ou une partie d'image, un bouton, etc.).

Tout lien peut être retenu, pourvu qu'il constitue un pont sémantique ou lexical entre deux noeuds d'information. La construction du graphe peut s'étaler dans le temps. Durant cette période, il n'est pas figé, toute nouvelle information peut en modifier l'allure. Ceci permet de faire émerger, et de confronter les repré